Article de JVN :
Pour ce nouvel épisode de Fallout, Bethesda laisse les rênes de la création au studio Obsidian, les développeurs de... Alpha Protocol. Mais quel est donc ce frisson d’angoisse qui vous parcourt ?
Certes, Alpha Protocol a été un ratage quasi total, la faute à une technique à la ramasse et un système de jeu mou du bulbe. Mais derrière cette vilaine peau, on sentait que le jeune homme aurait dû être diablement plus sexy. La qualité d’écriture était là et on percevait clairement de la part des développeurs une volonté d’offrir une expérience rôliste intéressante. En y réfléchissant bien, les causes de l’échec d’Alpha Protocol apparaissent pourtant évidentes : les petites mains habiles du studio étaient bien trop occupées à créer un chef-d'oeuvre : Fallout New Vegas. Ça y est, l’adjectif pompeux est lâché, avant même le premier intertitre. Maintenant que j’ai vendu la mèche, autant tout avouer : New Vegas est un jeu de rôle exceptionnel, bien meilleur que Fallout 3, et puise directement son talent dans les mythiques épisodes en 2D de la série.

Western radioactif
Avant de poursuivre dans le superlatif, commençons par pitcher le synopsis, comme on dit dans les magazines arty et bobos : vous débutez votre histoire en assistant à votre mort. Une bande de malfrats vous tient en joue, avec en son centre une espèce de réplique de Joe Pesci sapée d’un costard blanc à carreaux. Vous possédez apparemment quelque chose que ces mafieux post-nuke convoitent. Une bastos plus tard, c’est un médecin qui apparait devant vos yeux, bien content de vous revoir sur pied. Le toubib vous pose quelques questions sur votre identité, ce qui est l’occasion de créer son héros, via le très efficace système SPECIAL.

Vous voilà dans le village de Goodsprings, une charmante bourgade située au beau milieu des terres dévastées du Mojave, dans la région de New Vegas. Le Nevada n’est plus qu’un vague souvenir d’avant-guerre et c’est désormais la RNC (République de Nouvelle Californie) qui essaie tant bien que mal de maintenir l’ordre. Et vous, au milieu de tout ça, tentez de retrouver vos meurtriers afin de comprendre le pourquoi d’une telle agression. C’est vrai, après tout, vous n’étiez qu’un simple coursier embauché par un certain M. House pour lui livrer un jeton de platine, en apparence anodin...

American dream
Ce point de départ ne représente évidemment qu’une infime partie de ce qui vous attend. La région de New Vegas est vaste et n’imaginez pas gambader sur le Strip et flamber vos capsules au Black Jack ou dans les prostituées avant quelques heures de jeu. Cette progression par palier dans l’intrigue est d’ailleurs réellement intéressante, car particulièrement immersive. Chaque nouveau chapitre de la quête principale vous emmène dans une région inédite et, surtout, vous dévoile des points d’ombres inattendus. Impossible de savoir où tout cela nous mène et on se retrouve très souvent surpris de la direction prise par le scénario d’Obsidian. Et encore, je ne parle ici que du fil rouge. Les développeurs se sont en effet totalement investis dans une écriture démentielle et nous gratifient de tâches secondaires la plupart du temps passionnantes.

Il faut voir la région de Terres dévastées du Mojave comme une grande toile d’araignée, avec en son centre New Vegas, un lieu de vice convoité par des dizaines de communautés. La RNC rêve d’une société démocratique, mais pas trop, ou l’ordre prend enfin le dessus. La Légion de César donne dans le fanatisme extrême et massacre tous ceux qui s’adonnent au péché. Les Disciples de l’apocalypse font office d’ONG locale et essaient d’apporter soins et nourritures aux plus démunis. Les Kings perpétuent l’esprit d’Elvis et est assurément le gang de Freeside (la dernière ville avant le Strip) le plus influent… Impossible, ici, de lister toutes les forces en présence et leurs motivations, un ouvrage entier n’y suffirait pas. Bien entendu, vous pouvez, à un moment ou un autre, travailler pour la faction de votre choix, la trahir, la détruire ou en monter une contre l’autre. Le manichéisme est totalement absent dans ces terres brûlées et chacun agit avant tout pour ses intérêts. Avant même de parler gameplay, cette cohérence dans la description de la société rend le titre passionnant.

Antibourrin
En termes de liberté d’action, là aussi, Fallout New Vegas se montre brillant. Un exemple, pris en début de partie : vous débarquez dans une petite ville gardée par un sniper planqué dans les hauteurs. Celui-ci possède des informations sur votre meurtrier, mais refuse de vous aider, à moins que vous le débarrassiez d’un problème local : les raids de goules sauvages sont de plus en plus fréquents dans la région. Elles viennent apparemment d’un ancien site de lancement spatial, un peu plus loin au nord. Une fois sur place, vous comprenez qu’une secte de goules –pacifiques pour la plupart- tente de fabriquer une fusée pour, selon leur gourou, atteindre le paradis. Le chef est bien embêté, car la dernière étape du voyage est bloquée par des Nocturnes (des super mutants accros à l’invisibilité) qui ont élu domicile au sous-sol. Les manières de régler ce problème sont multiples : massacrer les deux camps, se débarrasser uniquement des Nocturnes pour permettre aux illuminés de partir, aider les mutants en trahissant les goules, ou convaincre tout se beau monde de se barrer gentiment. À vous de voir selon votre envie et les capacités de votre personnage. Cet exemple est loin du cas isolé et représente une simple étape dans une épopée qui peut vous emmener dans les cimes du pouvoir… Si vous le souhaitez.

Le vrai Fallout 3
New Vegas est donc une immense surprise et se paye le luxe de surpasser Fallout 3 sur bien des points : le scénario est mieux écrit, les quêtes sont plus intéressantes, les dialogues sonnent juste… On retrouve clairement ici l’ambiance malsaine des deux premiers épisodes, avec son lot de junkies étalés dans le caniveau, de prostitués accros au Jet, de groupuscules fascistes, et d’esclavagistes sans pitié. Côté système de jeu et interface, ça reste en revanche très proche du boulot effectué par Bethesda. La gestion de l’inventaire est toujours aussi chaotique, mais le mode de progression SPECIAL fait une fois de plus des merveilles. Ce qu’on peut finalement reprocher à New Vegas n’est que futilité pour un rôliste : le moteur graphique se fait vieux, les textures sont rarement fines et les temps de chargement trop nombreux. Mais on lui pardonne aisément, tant le monde crée par Obsidian est puissant, vivant, dangereux, cohérent, attachant… Ce talentueux studio est donc parvenu à nous offrir, douze ans après, un digne successeur à Fallout 2. On n’y croyait plus.
Sur quasiment tous les points, Fallout New Vegas est plus réussi que Fallout 3. Mieux écrit, plus immersif, plus varié et mieux rythmé, le dernier RPG d’Obisidian est une petite pépite radioactive que tout rôliste doit se procurer d’urgence, afin de vivre pleinement l’holocauste nucléaire.
Les Plus
Une qualité d’écriture indéniable
La création d’un univers crédible
Une ambiance incroyable
Les Moins
Le moteur graphique vieillit mal
L’interface de l’inventaire
Temps de chargement omniprésents
Merci à JVN pour ce test que l'on attendait tous !
Et voici le lien de l'article original : ICI


