Pazzi est un robot pizzaïolo créé par deux amis ingénieurs il y a plus de sept ans. Un premier restaurant vient d'ouvrir en région parisienne et quatre autres établissements devraient voir le jour d'ici 2021.
Installé derrière une verrière, le robot s’affaire. Les bras munis de pinces découpent la pâte, étalent la sauce, dispersent les ingrédients et mettent à cuire le tout. En cinq minutes, la pizza est prête. Dans le centre commercial Val d’Europe en région parisienne, les clients s’arrêtent, intrigués. Pazzi est le premier restaurant en France dans lequel le cuisinier n’est pas un humain mais un robot.
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Il existe déjà des engins destinés à épauler les pizzaïolos aux Etats-Unis, mais ils ne sont jamais autonomes. Chez Pazzi, le robot s’occupe de tout, à l'exception de la préparation de la pâte et de la découpe des ingrédients.
Le projet est né de la réflexion de deux amis en école d’ingénieurs qui mangeaient, de l’aveux de l’un d’eux, Sébastien Reverso, “beaucoup de pizzas qui n’étaient pas très bonnes”. Leur vient alors l’idée d’un robot pizzaïolo autonome.
“Avant tout, on a passé beaucoup de temps à regarder et à analyser sur YouTube la manière de faire des pizzaïolos. On est rapidement passé à l’expérience. Au début, elles n’étaient vraiment pas très bonnes”, s'amuse Sébastien Reverso, l’un des deux fondateurs.
Le robot meilleur qu’un humain?
Le robot Pazzi n’est pas plus rapide qu’un “vrai” pizzaïolo. Il met environ cinq minutes à faire une pizza. Mais il peut en cuisiner dix à la fois.
“La maîtrise du temps est le gros point fort. Le robot peut faire une pizza toutes les quarante secondes. Donc si vous en commandez une, vous attendrez 4 minutes mais si vous en prenez trois, vous attendrez 4 minutes 30”, souligne Sébastien Reverso.
Un point crucial pour l’entreprise, qui entend déployer son service dans des lieux “où les gens n’ont pas beaucoup de temps”. Comme à Val d’Europe, le centre commercial dans lequel leur premier établissement a ouvert en décembre. Quatre autres “pazzirias” devraient ouvrir d’ici 2021 en Île-de-France. La volonté est bien sûr de s’implanter à l’étranger. Le robot dispose d’ailleurs de cinq brevets à l’international.
À l’heure actuelle, le robot n’est toutefois pas plus rentable qu’un humain.
“La technologie est encore très chère. Le premier prototype a coûté un million d’euros rien que pour la fabrication. On ne parle même pas de la recherche et développement. Mais c’est normal sur une première version. Les coûts vont diminuer à terme et ça deviendra rentable rapidement”, croit Sébastien Reverso.
Un robot très intelligent
La pâte à pizza est encore préparée par un humain, afin de garantir sa qualité. Le robot se charge ensuite de prendre la bonne portion et de l’étaler. Et à l’aide d’un système de vision, il peut repérer s’il y a une anomalie.
“S’il y a un trou dans la pâte, il va mettre de côté celle qui est ratée pour en prendre une nouvelle. On lui a appris a être totalement autonome. Il est capable de détecter les erreurs et de se corriger. Ça a rendu le projet très complexe parce qu’il fallait trouver une parade pour chaque incident", explique le co-fondateur. “On avait écrit sur des post-it toutes les contraintes qu’il pouvait y avoir. Il y en avait tout un mur”.
Tout n’est pas encore parfaitement au point. Sous l’œil amusé des visiteurs, le robot jette six fois d’affilé la pâte dans un tiroir, visiblement insatisfait de son travail. Elle n’est pas mise à la poubelle: tout sera réutilisé. Vient ensuite l’étape de la sauce. Pazzi la verse et l’étale sur la pâte avec une louche, qu’il rince juste après.
“Pour l’hygiène, il rince ses ustensiles et nettoie son plan de travail. Mais surtout, il lance un lave-vaisselle toutes les deux heures", s’amuse Sébastien Reverso. "Il est aussi capable de passer une commande à nos fournisseurs si un ingrédient vient à manquer !”
La répartition des ingrédients se fait à l’abri des yeux des clients, dans une chambre froide installée derrière le mur, avec un bras robotisé supplémentaire relié au système. Reste ensuite la cuisson. Une fois la pâte bien dorée, le robot saisit la pizza et la range dans sa boîte en carton en la découpant avec un grand couteau.
Entre 8 et 14 euros la pizza
Pour séduire les consommateurs, Pazzi s’est positionné sur les prix des chaînes de restauration rapide. Les pizzas sont vendues entre 8 euros et 14 euros.
“Le tout, avec des produits de grande qualité. Nos fromages sont des AOP, les légumes sont bio et viennent d’Italie. Nos viandes sont bien sûr françaises et nos poissons, issus de la pêches durables”, énonce Alexandre Auriac, co-fondateur de Big Fernand et désormais responsable de l’innovation chez Pazzi.
Les recettes ont été élaborées par Thierry Graffagnino, triple champion du monde de la pizza.
Quant à savoir si ce recours à un robot a une influence négative sur l’emploi, Sébastien Reverso s’en défend et explique que Pazzi a déjà embauché une trentaine de personnes. Avant de conclure: “A-t-on vraiment envie que ces métiers très répétitifs soient encore effectués par des humains? Je ne suis pas sûr”.